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Rude journée pour Marianne

Il faut un coupable à cette grande déflagration que notre pays vient de connaître, à savoir  la présence de Monsieur Le Pen au second tour. Les sondages n’avaient rien vu venir, c’était une aubaine pour le leader d’extrême droite dont la stratégie grossière fonctionnait. Il se disait« victimisé », traîné dans la boue pour ses idées « révolutionnaires ». Dans son discours la souffrance de l’Homme n’était qu’un gros « détail ».

La vision approximative que « les médias » ont donné de cet homme arrogant et sûr de lui, devait le mener vers cette première victoire.

Les élections du premier tour  avaient eu lieu dans une atmosphère surréaliste où presque personne ne votaient vraiment, les électeurs se réserveraient pour la belle, « les autres » voteraient Jospin de toute façon. Il était de bon ton de voter  pour « un petit candidat », ce n’était pas dangereux cela se faisait depuis bien longtemps.

Tf1 la chaîne commerciale, déçue par ses résultats publicitaires tentait alors de regagner du public, en produisant des reportages proches de la « dramatique télé » montrant Mr Le Pen, homme pourtant fatigué, courir à tous vents pour obtenir ses 500 signatures. Il était « évidemment » persécuté, diffamé par la droite et la gauche à la fois, lui qui chantait si bien la Marseillaise. Lui, si triste pour les métallos, les petites gens, les laissés pour compte qui croient encore au père Noël.

A moindre frais sa pub était faite, des millions de gens trouvant à l’écran un homme « relooké » et désormais fréquentable.

LCI, la télé d’informations continues sur le câble, martèle 55 fois par jour, les bons mots de Lepen, une pub efficace et inespéré. Arlette Laguiller l’irresponsable, prône sans sourciller la révolution, comme si les démunis avaient le temps de s’amuser. Tout cela sème davantage  le trouble dans l’esprit des électeurs, pendant que la gauche se perd en discours dérisoires.

France info comme la télé répète inlassablement les mots empoisonnés de Le Pen, on entre dans la spirale du rabâchage diabolique.

Grâce à des images faites d’illusions, Le Pen tisse sa toile de « stabilité rhétorique ».

Tribun hors pair, il est adopté par l’audio-visuel pour ses parts de marché plus que d’humanité.

Sur France-culture dans l’émission du matin » première », Pierre Assouline signalait que nul ne pouvait être poursuivi si l’usage des qualificatifs tels que «  facho, raciste, tortionnaire s’appliquait tout spécialement à Mr Le Pen.

André Breton, prévoyant quelque cataclysme, disait subtilement : « La médiocrité de l’univers ne défend elle pas notre pouvoir de dénonciation ?

Alain Penso le 8 mai 2002