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� Jacques Halbronn � Le cin�ma est une machine � remonter dans le temps car par del� son caract�re de fiction, il n�en conserve pas moins toujours une certaine dimension documentaire, plus ou moins involontairement (cf Marc Ferro, Cin�ma et Histoire, Paris, Gallimard, 1993). C�est ainsi, pour ne prendre qu�un exemple, que le port du chapeau par les hommes n�est certainement pas voulu par un quelconque sc�nario mais est bien le t�moignage des coutumes vestimentaires d�une certaine �poque. Avec le recul, tous ces personnages munis d�un couvre-chef, il y a encore quarante ans, nous semblent quelque peu insolite � l�image d�un Michel Picoli affubl�, en permanence d�un feutre dans de Godard. le M�pris (1963). On peut observer ainsi d�ann�e en ann�e, l�abandon progressif du chapeau. Il y a l� un mat�riau pr�cieux pour le sociologue, par del� les enjeux artistiques dans la mesure m�me o� c�est ce qui n�est pas ma�tris� qui l�int�resse. I � Le cin�ma et la culture de la contingenceQuand on �coute de la musique �classique�, on sait que le morceau peut �tre interpr�t�, dirig�, par diverses personnes. Nous avons la capacit� � retrouver l�oeuvre au travers de tels avatars. Il en est g�n�ralement de m�me pour le th��tre�: un com�dien en remplace fr�quemment un autre, et comment en serait-il autrement � travers les si�cles�? En revanche, la peinture ne permet pas une telle distanciation et si un autre peintre choisit le m�me motif qu�un pr�d�cesseur, on n�en consid�re pas moins qu�il fait oeuvre nouvelle. C�est un remake. Paradoxalement, on pourrait dire que pour la musique ou pour le th��tre, les variations individuelles sont relativis�es et que l�on ne s�approprie pas ais�ment un document en se contentant de le recopier car que fait un interpr�te sinon d�imiter�? En ce qui concerne le film, qui en fait se rapproche plus de la peinture par son caract�re �fig�, l'interpr�te n�est pas interchangeable m�me si dans le pass� certains cin�astes internationaux r�alis�rent des films avec un casting diff�rent selon la langue choisie. En ce sens, nous dirons que le cin�ma appartient � une culture de la contingence. Entendons par l� qu�il ne nous permet pas de prendre de la distance par rapport � ce qui nous est montr�, � ce qui �arrive� devant nous. On ne nous fournit pas une partition ou un texte de r�f�rence. Le produit est litt�ralement �fini�. La dualit� entre le n�cessaire et le contingent est effac�e. Cela expliquerait pourquoi nos contemporains semblent avoir de plus en plus de mal � rep�rer des grilles derri�re l�apparence des choses. Ce sont les enfants du cin�ma. Le fait que dans les g�n�riques, les noms des com�diens apparaissent le plus souvent avant celui du cin�aste est �galement assez typique d�une certaine inversion quand on compare avec le th��tre � on dira une pi�ce de Shakespeare ou de Moli�re � � telle enseigne d�ailleurs que le public, dans de nombreux cas, ne se souvient pas du nom du cin�aste, de l�auteur, alors qu�il aura enregistr� les images et notamment les visages des com�diens. Le cr�ateur du film est comme �vinc� et cela n�est �videmment pas innocent ni dans ses causes ni dans ses effets. La culture cin�matographique est d�ailleurs ponctuelle�: on ne voit un film qu�une fois comme on ne vit un �v�nement qu�une fois. Le film fait partie de notre vie, et notre vie n�est pas cens�e se r�p�ter du moins pas litt�ralement�: revoir un film serait comme voyager dans le temps et retrouver le pass� intact. Il en est certes de m�me du tableau mais celui-ci diff�re trop du r�el par son absence de mouvement pour que l�illusion soit possible et c�est pourquoi l�acte de revoir de multiple fois une toile fait moins probl�me que pour un film�: l�expression �je l�ai d�j� vu� est � l�intention de ce dernier une fin de non recevoir. Le film offre une sorte de r�sistance � toute tentative de distanciation�: il est ce qu�il est tout comme un individu est ce qu�il est, qu�un �v�nement est ce qu�il est. Le cin�ma serait en ce sens porteur d�une certaine philosophie � en message plus ou moins subliminal � de la contingence qui s�apparenterait � de la ph�nom�nologie. �Le spectateur est certes conscient que le film s��labore � partir d�un sc�nario mais le dit sc�nario occupe une place quelque peu subalterne si on le compare avec la pi�ce de th��tre, terme qui d�signe le texte et pas seulement une certaine interpr�tation de celui-ci. Ce sc�nario, au fond, s�inscrira dans un contexte pr�cis et pourra difficilement en changer par la suite. On saisit tout ce qu�il peut y avoir de port�e � passer du th��tre vers le cin�ma, d�une soci�t� de l�interchangeable, un com�dien pouvant en remplacer un autre, � une soci�t� qui privil�gie le global, en une sorte d�intemporalit�, m�me si � l��vidence le regard du spectateur change face � du cellulo�d immuable. Au cin�ma, sauf exception, on ne devine pas les coulisses, les machinistes qui se doivent rester invisibles alors qu�au th��tre, on voit bien que tout n�est que d�cor.. C�est la m�me diff�rence entre aller au concert et �couter un disque, dans lequel celui qui n�est pas initi� aurait bien du mal � imaginer comment les choses se passent �en vrai� sur le plateau d�enregistrement. La musique contemporaine tend � se modeler sur le cin�ma en tant que musique improvis�e (on pense au jazz) et pouvant �tre enregistr�e mais non r�interpr�t�e tout comme le cin�ma ne peut pas �tre r�interpr�t�, pas plus d�ailleurs que la peinture non figurative qui n�a pas de mod�le pouvant servir de rep�re � d�autres lectures centr�es sur le m�me objet. Seulement, lorsque le cin�ma s�appuie sur un r�cit historique (comme celui de Jeanne d�Arc) peut-il disposer d�un r�f�rentiel ouvert � plusieurs lectures. Le cin�ma incarne un art contemporain o� l��uvre n�a plus son objet � sa partition �� � l�ext�rieur d�elle-m�me mais � l�int�rieur. Un art clos sur lui-m�me. Quant au th��tre, � partir du moment o� il est film�, il tend, lui aussi, � suivre cette pente, se figeant sur une interpr�tation unique ou qui �clipse les autres par sa permanence. A la diff�rence du dramaturge, le cin�aste pr�tend tout contr�ler une fois pour toutes et imposer sa lecture toute contingente qu�elle soit. Le th��tre �tait une �cole de la r�currence et du recommencement p�riodique, la pi�ce renaissant avec de nouveaux com�diens, une nouvelle mise en sc�ne, de nouveaux d�cors tout en restant quelque part elle-m�me. C��tait au demeurant une clef pour comprendre l�Histoire et le mod�le ne diff�rait gu�re de celui de la science. Avec le cin�ma, il y a divorce de l�art d�avec la science, en ce que le cin�ma bascule vers la contingence. Est-ce que la dualit� est pour autant �vacu�e du cin�ma�? Le rapport entre le cin�aste et son �quipe n�en est pas moins fortement marqu�. D�un c�t� un ma�tre d��uvre qui a la main sur tout et de l�autre des gens qui ont chacun une t�che sp�cifique sans v�ritable vue de l�ensemble lequel d�ailleurs ne prend forme souvent qu�en derni�re instance. Certes, mais il n�en reste pas moins que l��uvre th��trale transcendait ses diff�rents interpr�tes tandis que l��uvre cin�matographique tend � devenir unitaire�: une seule version, un seul visage pour chaque r�le. Le com�dien fait pendant � l�auteur au lieu de n��tre, comme au th��tre, qu�un personnage interchangeable face � un auteur � la pr�sence permanente. Ce cin�ma n� � l�aube du XXe si�cle nous semble, � merveille, personnifier toutes les d�rives totalitaires et �galitaires de ce si�cle, il incarne un si�cle qui ignore la partition qui se joue et se contente de rester en surface, au nom d�une ph�nom�nologie directement h�rit�e de cette (con)fusion entre le n�cessaire et le contingent. Le divorce entre le public et l�art contemporain tient � cette perte de l�histoire sous-jacente�: plus de sujet identifiable chez le peintre voire chez le sculpteur, plus de partition chez le compositeur, que l�on puisse s�approprier. Le cin�ma est par excellence le refus de la part de l�auteur de laisser l�autre s�approprier l��uvre et en quelque sorte d�y entrer. Nous m�mes, en tant que compositeur de musique pour piano, � nos heures, nous refusons toute partition donc toute imitation. Notre improvisation est enregistr�e et doit exister en tant que telle, elle n�a pas � �tre rejou�e par quiconque pas m�me par son auteur qui est condamn�, en une fuite en avant, � produire toujours d�autres oeuvres tout aussi herm�tiquement closes. Mais, apparemment, ce qui choque dans la musique et dans la peinture contemporaines est accept� au niveau du cin�ma, th��tre sans texte disponible qui permettrait d��tre rejou� autrement. Il est vrai que le cin�ma reste fondamentalement figuratif, il repr�sente des personnes, des lieux�: s�il ne s�appuie pas sur une histoire connue, il s�inscrit bel et bien dans une sociologie identifiable. C�est en fait notre soci�t� qui est la partition du film et chaque film ne fait que rejouer la m�me com�die humaine. Le cin�ma ne serait fait que d�un seul et unique film aux infinies variations et chaque cin�aste n�en serait que l�un des multiples interpr�tes. La �partition� de ce film unique n�est jamais que celle qui met face � face l�homme et la femme et quelques autres clivages comme ceux de l��tranger, de la machine (2001, Odyss�e de l�espace). En ce sens, le r�el dont le film est le reflet appartient aux sciences de l�Homme et nous ne sommes gu�re loin d�s lors de ces natures mortes ou de ces portraits l�gu�s par les peintres figuratifs. En d�finitive, le cin�ma nous appara�t bien au contraire comme le refuge de cette dualit� en art. Chaque spectateur peut all�grement se projeter dans le film. Oublions l�histoire plus ou moins pittoresque qui est racont�e pour nous int�resser � cette humanit� engag�e dans une structure spatio-temporelle largement immuable mais se pr�tant � tant de lectures. Face au compositeur enferm� dans sa tour d�ivoire et confisquant toute interpr�tation � son seul b�n�fice ou � celui de ses sbires, face au peintre qui ne fournit plus les clefs de son inspiration et brouille les pistes, le cin�aste, lui, se contente de gloser sur un monde qui nous est familier et qui est nous-m�me. On pourrait d�s lors penser que le texte de la pi�ce de th��tre ne faisait que faire obstacle, �cran, entre nous et le monde. Le dramaturge d�autrefois pesait d�un poids beaucoup plus lourd que le cin�aste�: c��tait son texte qui �tait interpr�t� et non le monde. C��tait un d�miurge. Le cin�ma a �vacu� ce sacro-saint texte auquel nous n�avons plus acc�s � le texte, la partition, le mod�le sont morts �: il ne reste plus qu�un miroir tendu � chaque spectateur. Il y aurait donc eu involution�: d�un c�t� des oeuvres musicales, picturales, qui parviennent � un sommet d�abstraction, � un paroxysme d��volution et de l�autre � clivage socioculturel majeur � une r�gression qui renvoie l�homme � une r�alit� brute ind�finiment reproduite de film en film. Au cin�ma, l�on n�a plus � apprendre � reconna�tre l��uvre � travers tous ses avatars et ses manifestations et interpr�tations, au cours des ann�es et des si�cles, mais l�on peut suivre tel com�dien/ acteur sous tous ses r�les et d�guisements, d�o� la n�cessit� de ce fil d�Ariane du star system (cf. aussi la s�rie t�l�vis�e) qui reste le fondement de la culture cin�ma/t�l�film comme si on suivait ses aventures d�un film � l�autre.... II � L�image de la femme dans le cin�ma de la Nouvelle Vague.La fin des ann�es Cinquante et le d�but des ann�es Soixante voit appara�tre ce qu�on appellera � l��poque, la Nouvelle Vague, avec des cin�astes comme Resnais, Vadim, Chabrol, Godard, Truffaut, Roehmer, Melville et quelques autres souvent li�s � la revue des Cahiers du Cin�ma. Plusieurs des films de ces auteurs remport�rent alors des prix, lors de festivals, notamment � Cannes et � Venise. Quelles �taient donc les particularit�s de ce cin�ma, par del� un renouvellement du jeu d�acteurs, des prises � l�ext�rieur�?. Nous pensons que l��l�ment le plus fort et qui ne nous semble pas avoir �t� jusqu�ici d�sign� comme tel � on est dans le non-dit � concerne l�image de la femme et disons-le une certaine fascination ainsi exprim�e � son �gard, ce qui ne ressort �videmment que par comparaison avec la production qui pr�c�da et qui suivit la Nouvelle Vague. Selon nous, quelque chose de l�ordre du refoul� pouvait enfin se manifester chez ces cin�astes-hommes, disant enfin tout haut ce que leurs cong�n�res pensaient tout bas et c��tait � propos de la femme. D�o� un titre significatif�: Et Dieu cr�a la femme de Roger Vadim (1956) avec Brigitte Bardot, dans le r�le de Juliette. �Vadim impose avec Brigitte Bardot, un nouveau type de femme moderne libre des mouvements de son corps et de l��lan de ses d�sirs, � cent lieues des st�r�otypes ant�rieurs du cin�ma fran�ais� (Dictionnaire des films, Dir. B. Rapp & J. Cl. Lamy, Paris, Larousse, 1999, p, 435). Mais le ph�nom�ne ne se r�duit nullement � B. B. et encore moins � Vadim, son �poux. Selon nous, la femme est pr�sent�e, de fa�on quelque peu caricaturale, � la limite de la misogynie d�un Herv� Bazin (notamment son roman, Vip�re au point, 1948, avec le personnage de Folcoche, qui sera interpr�t� par la suite par Alice Sapritch),� comme une force de la nature qui vient pi�tiner et perturber le monde des hommes et on est l� aux antipodes d�une id�ologie qui plus tard tendra � l�emporter et qui en gommera les asp�rit�s et la banalisera. Probablement, c�est le en costumes de Fran�ois Truffaut, Jules et Jim (1962), avec Jeanne Moreau qui est le plus frappant quant � cette image ainsi projet�e, c�est le cas de le dire, d�une femme qui appara�t en quelque sorte comme l�instrument du destin. Le film, � la fameuse ritournelle �J�ai la m�moire qui flanche, j�me souviens plus tr�s bien etc.�, se conclut sur une Catherine d�sinvolte prenant dans sa voiture Jim et l'entra�nant ainsi d�lib�r�ment vers la mort. La femme est en effet souvent, dans ces films, celle par qui le scandale arrive et objet de discorde entre les hommes. Dans les Cousins (1959), Chabrol place une jeune femme, jou�e par Juliette Mayniel, d�sir�e par les deux cousins, jou�s par Brialy et G�rard Blain et qui aboutit � la mort � accidentelle � du second. Dans son premier film, les Mistons (1958), Truffaut avait montr� la fascination exerc�e par le personnage jou� par Bernadette Lafont, sur une bande de jeune gar�ons, litt�ralement hypnotis�s.. Ainsi, dans A bout de souffle de Jean-Luc Godard (1960), Michel Poiccard, interpr�t� par Jean-Paul Belmondo est-il trahi par Patricia Franchini, jou�e par l�am�ricaine Jean Seberg. Elle lui explique � la fin qu�en le trahissant, elle s��tait ainsi prouv� qu�elle ne l�aimait pas, ce qui plonge son partenaire dans un ab�me de perplexit�, une sorte de saturation � il est litt�ralement � bout de souffle � qui le conduit � se faire tuer par un policier. D�une fa�on plus l�g�re, un autre film de Godard, Une femme est une femme (1960), au titre � combien r�v�lateur, s'ach�ve sur ce dialogue�: �tu es inf�me� dit l�homme, jou� par Jeant-Claude Brialy�; �non, je suis une femme� r�plique la femme, pr�te � tout pour qu�on lui fasse un enfant, jou�e par Anna Karina. Dans le M�pris (1963) de Godard, on voit le personnage jou� par Michel Piccoli tortur� moralement par ce m�pris exprim� par sa femme, Camille (Brigitte Bardot), cette derni�re mourant dans un accident en compagnie d�un autre homme. Dans Tirez sur le pianiste (1960) de Truffaut, les femmes marquent profond�ment le destin du personnage jou� par Charles Aznavour. On retrouve encore le personnage fatal de la femme (jou�e par Bernadette Lafont) dans le film de Claude Chabrol, le Beau Serge (1959) avec les m�mes acteurs masculins qui joueront dans les Cousins ainsi que dans Lola (1961), de Jacques Demy, dont le r�le titre est interpr�t� par Anouk Aim�e. Dans Hiroshima mon amour (1959) d�Alain Resnais, Emmanuelle Riva est le personnage principal, pris entre une aventure avec un soldat allemand, sous l�Occupation et un japonais �voquant la bombe d�Hiroshima. On retrouve Emmanuelle Riva dans un personnage de tentatrice, dans le film de Jean-Pierre Melville, L�on Morin pr�tre (1961), en personnage de tentatrice, voulant le faire quitter le droit chemin, celui de sa vocation, face � un jeune abb�. Bref, gare � l�homme qui rencontre une femme sur son chemin. Par sa personnalit�, la femme, dans le Cin�ma de la Nouvelle Vague, est un d�fi � tout, elle offre un aspect diabolique, sa rencontre est fatale, constitue une �preuve. Dans le Doulos (1962) de Melville, on apprend tout � la fin du film que, malgr� les apparences, ce n�est pas l�homme, jou� par Belmondo, qui est le tra�tre mais la femme (jou�e par Fabienne Dali). Il faudrait encore citer Rocco et ses Fr�res (1960) de Luchino Visconti, film franco-italien de Visconti, pour le personnage de Nadia jou� par Annie Girardot qui est la cause de l�affrontement, comme dans Et Dieu cr�a la femme, entre deux fr�res, Rocco �tant interpr�t� par Alain Delon. Avec le recul, quarante ans apr�s, on regarde ses films comme marqu�s par un certain exotisme et d�ailleurs, il semble bien que le cin�ma fran�ais n�offre plus de r�les f�minins de la m�me envergure qu�� la fin des ann�es Cinquante, climat que l�on retrouve encore dans les films d�Eric Roehmer, comme la Collectionneuse (1967), au titre �difiant, avec Hayd�e Politoff. Peut-�tre aussi dans le Belle de jour (1967) de Luis Bunuel, avec un personnage � combien tourment�, interpr�t� par une Catherine Deneuve qui jouera en 1969 dans le film de Truffaut, La Sir�ne du Mississipi, aux c�t�s de Belmondo, un personnage envo�tant. Il en �tait de m�me de cette femme, v�ritable Parque, de La Mari�e �tait en noir, du m�me Truffaut. (1967) avec Julie � Jeanne Moreau.� En 1969, Chabrol avait sign� un film intitul� La femme infid�le, avec St�phane Audran, �pouse du cin�aste, dans le personnage f�minin volage mais une happy end permettait au couple de se ressouder. Ainsi, le ph�nom�ne Nouvelle Vague s�articule-t-il, selon nous, autour de l�id�e d�une sorte d'H�l�ne de Troie, source de catastrophes et en tout cas de drames, un personnage somme toute assez monstrueux, c�est � dire litt�ralement que l�on montre, que l�on met en sc�ne. C�est probablement ce qui a s�duit le public auquel on offrait ainsi une sorte de catharsis en mettant au pilori un �tre ainsi � la fois mythifi� par le cin�ma et d�sormais, par ce passage � l�acte,� d�mystifi�, exorcis� �: une �ve hyst�rique entra�nant les hommes � leur perte. Il y a l� comme un r�glement de compte, comme une invite � un d�foulement collectif, par le truchement du cin�ma, g�n�rant du drame devenu psychodrame. C�est de cela � de cette d�nonciation � que le public aura �t� reconnaissant envers cette Nouvelle Vague, comme si on avait soulev� une chape de plomb, mettant fin � une certaine langue de bois.. L��volution des r�les d�un Jean-Paul Belmondo nous semble bien souligner la fin de cette p�riode o� la femme constitue la clef de vo�te des films. D�ailleurs, une Brigitte Bardot ne mettra-t-elle pas fin pr�matur�ment � sa carri�re�? Quant � Belmondo � acteur et personnage � il ne se confrontera plus tant � des femmes qu�� des hommes, la femme n�est plus un adversaire, un enjeu significatifs comme elle l�est d�ailleurs dans les films de James Bond. Dans un film de Melville, comme le Cercle Rouge ( d�s 1970), les femmes ne sont nullement au centre de l�action, c�est un film d�hommes o� les femmes ne sont que de p�les comparses jou�s par des com�diennes de second plan. On est loin de L�on Morin pr�tre�! Une Simone Signoret, d�j� vieillie et marqu�e, dans l�Arm�e des Ombres (1969) du m�me Melville, symbolise l��volution du personnage f�minin, dix ans apr�s. Certes, on n�a pas attendu la Nouvelle Vague pour que les hommes se disputent les femmes. Mais celles-ci n��taient souvent que des objets passifs de convoitise, elles ne mettaient pas de l�huile sur le feu. Dans la p�riode qui nous int�resse, la femme entra�ne les hommes dans son propre destin, dans sa folie, comme le montre de fa�on embl�matique et symbolique le film Jules et Jim de Truffaut. Un homme aux prises avec la femme, vamp, personnage diabolis�, qui le conduit � sa perte, qui lui fait perdre la t�te, dont Marl�ne Dietrich pourrait �tre l�arch�type, dans La Femme et le Pantin (1935) de Josef von Sternberg.(en anglais, The Devil is a woman), � la suite de l�Ange Bleu (1930), qui exposait la d�ch�ance par l�amour subie par l�homme au contact de la femme. Mais la Marylin Monroe des Misfits (1961) de John Huston, �voluant entre plusieurs hommes, dans une sorte de fuite en avant, n�est-elle pas exactement contemporaine de la Nouvelle Vague�? Le cin�ma, depuis belle lurette, se garde bien de montrer la femme comme un �tre excentrique et inclassable, cela nuirait � l�id�ologie r�gnante de la femme responsable et interchangeable avec l�homme. Il serait peut �tre sain � m�me si cela ne serait pas politiquement correct � de refaire des films qui d�masquent la femme qui, fondamentalement n�a pas chang�, un film comme The Hours semble aller dans ce sens. Cela contribuerait au demeurant � lib�rer la femme d�un certain carcan et lui permettrait de renouer avec une certaine mythologie. Il nous semble, en effet, que cette image de la femme un peu fofolle ou tentatrice ne soit plus de mise dans le cin�ma fran�ais tout simplement parce que la soci�t� renvoie une autre image de la femme, plus responsable. L��re de la femme enfant est r�volue. La femme plus en phase avec la soci�t� tend � perdre de son magn�tisme.. La femme des trente derni�res ann�es du XXe si�cle est plus raisonnable, plus sage � du fait du divorce de plus en plus probable au cours de son existence, ce qui la rend plus autonome � elle n�est plus encline � commettre des actes gratuits, moins irresponsable, elle se met moins en faute, parfois victime, et donc c�est une autre race de com�diennes qui est recrut�e. Auparavant, la femme n�avait d�autre arme pour conqu�rir l�homme dont elle avait besoin, psychiquement sinon mat�riellement, que son charme�; aujourd�hui, sevr�e, elle n�a plus besoin de l�homme, elle perd donc de sa fascination qu�elle n�exerce plus comme avant, elle p�se moins sur sa vie et le cin�ma, miroir de la soci�t�, s�en ressent. Cependant, le cin�ma, ces derni�res ann�es, semble avoir trouv� une voie d�tourn�e pour changer l�image de la femme�: il propose des couples o� la femme est beaucoup plus jeune que l�homme, ce qui permet � celle-ci, de facto, de jouer, litt�ralement, ce r�le de la femme-enfant. Il est remarquable que ce soient des cin�astes femmes fran�aises qui souvent campent des rencontres entre un homme d�un certain �ge et une jeune femme encore que le cin�ma am�ricain nous ait aussi r�cemment propos� ce cas de figure. � l��poque de la Nouvelle Vague, l�homme et la femme avaient le m�me �ge. De nos jours, en raison d�un certain Surmoi qui exige une �galit� comportementale, la seule fa�on de poser la diff�rence entre l�Homme et la Femme, c�est de la transposer en une diff�rence d��ge, l��ge restant un des rares clivages qui soit encore respect�.. Quand la femme est nettement plus jeune que l�Homme, elle se sent en droit de laisser cours � une certaine fantaisie, de son �ge sinon de son sexe. Un film fran�ais r�cent, Le C�ur des Hommes, de Marc Esposito, montre un homme, jou� par G�rard Darmon, quittant l��pouse de son �ge pour vivre avec une femme beaucoup plus jeune. Voil� qui d�note bien un malaise quant � l�identit� f�minine qui ne parvient plus � �tre pens�e que par un tel biais. JH � le 16.05 03 |
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